Temps de lecture : 10 minutes
MAJ 17/09/18 : Les internet s’affolent de nouveau et bruissent d’avis depuis que Gamekult a relancé sa formule Premium le 7 juillet 2015 après diverses tentatives passées, suivies par d’autres sites concurrents (Gameblog). Bien loin de la polémique, petit point sur ce folie du premium, et le sujet est loin de faire l’unanimité dans l’octoteam d’ailleurs ! Après un échange récent avec le rédacteur en chef de GK, grosse douche froide vis-à-vis du Premium….
Sommaire
- Gamekult (re)devient… premium ?
- Gameblog représente tout ce qu’il ne faut pas faire avec le Premium
- L’offre premium, du kick starter à chaque sauce ?
- De nouveaux contenus
Membre du club des 5 premiers sites vidéoludiques francophones en terme de fréquentation, Gamekult (GK) a décidé de revoir son offre payante « Premium » en s’appuyant dessus pour se financer en partie. Il est vrai que les revenus publicitaires, base de l’internet gratuit au côté du dévouement des sites passionnés 100 % gratuits (dont octopaddle.fr porte bien haut les couleurs), se sont taris rapidement face à de nouveaux modes de consommations et le refus des lecteurs de se laisser pourrir leur navigation sur des sites inondés de pubs (merci Adblock). Alors quelle solution pour les sites internet comportant des salariés qu’il faut rémunérer en fin de mois ? Gamekult racheté un temps par CNET Networks en 2007, connut le départ des fondateurs du site en 2008 (Clément Apap dit « Raggal » et Kevin Kuipers). Certes, le site soutenu par CNET pouvait disposer de fonds qui lui permettait de vivre aux côtés d’autres ressources (comme la pub). Actuellement, le site qui changea plusieurs fois de propriétaires est désormais dirigé par des anciens de CNET France et intégré dans un ensemble dénommé CUP Interactive et depuis 2015 à une holding liée à Tf1, Neweb (source Wikipédia). Pour diversifier ses ressources, GK décida de se lancer dans les offres Premium comme bon nombre de sites, dans le jeu vidéo, mais aussi dans d’autres domaines, et ceux dès 2008. Perso, cela m’avait irrité à l’époque, car l’internet gratuit restait une valeur importante à mes yeux, et j’utilise à bon escient l’imparfait, car avec le temps, j’ai évolué sur cette « gratuité du Net », comme je le développerai plus loin. Et chose cocasse, GK utilise le même mode de fonctionnement que son alter ego francophone et concurrent, néanmoins petit frère en âge – oui vous savez celui qui vous met souvent la honte, qui s’habille n’importe comment, se complet dans une hystérie adolescente et devient un porte panneaux publicitaire permanent – bref, le « iago shakespearien » par essence : Gameblog !
Gameblog représente tout ce qu’il ne faut pas faire avec le Premium

Racoleur, vous avez dit racoleur ?
Ce site loin d’être soutenu par un gros groupe à son corps défendant, a privilégié pour s’autofinancer la piste du clic facile, des liens troubles avec les éditeurs, des titres accrocheurs et autres polémiques stériles (bien souvent envers GK d’ailleurs, tel le sale gosse la morve au nez qui s’est fait piquer son goûter et cherche un bouc émissaire :). Perso, quand Gameblog a lancé son offre premium en 2010, j’ai senti une grosse lassitude (et le mot est faible) envers la rédaction d’un site qui je suivais depuis leur premier podcast en 2007 : tout d’abord, la dégradation du contenu éditorial du site (sans parler du départ des rédacteurs atypiques : Angel, Kendy, …) qui évapora la magie des premiers temps de cette équipe issue du monde des magazines papiers des 90′. Les avantages annoncés furent finalement assez peu révolutionnaire : accès privilégié à des events de la rédaction, suppression de la pub ou encore accès aux vidéos/ podcast une semaine avant…. bref rien de sensationnel. Cependant, le premium pris une place de plus en plus redondante et devint l’alpha et l’oméga de Gameblog, répété à chaque podcast à satiété ad nauseam : « abonnez vous », « mais il faut s’abonner ! » Etre premium c’est nécessaire », « le premium est super », « il faut devenir premium… » et blablablabla… à tel point que depuis sa création en 2010, on peut affirmer que le premium devient pour GB (et JC Chièze en particulier) une obsession à chaque podcast !
Résultat bien souvent quand débute cette litanie plaintive, j’efface le podcast sans aller plus loin, car JE DÉTESTE QUE L’ON ME FORCE LA MAIN ! A cela s’ajoute une grande déception envers un site qui a bien perdu : vous voulez écouter la différence entre aujourd’hui et ce que fut GB à son départ ? Sur iTunes écoutez les premiers podcasts (celui sur la Dreamcast ou la Gameboy au hasard), où l’on pouvait sentir la flamme, l’envie et une vraie bande de potes à tu et à toi… Ceux d’aujourd’hui sont désormais assez tristes, hystériques, et franchement… que sont pénibles ces joutes orales dignes du niveau d’un collégien (dédicace au numéro sur E3 2015 très puérile).
L’offre premium, du kick starter à chaque sauce ?
Donc, instaurer un premium doit contribuer à tout prix à éviter de tomber dans le racolage facile (d’autant plus que le Sénat vient de le repénaliser, hein moi je dis ça, je dis rien), pour éviter de perdre le cœur du gamer qui souhaite aider son site préféré. Car cette mode du premium sans doute issu du « cerveau » d’un banquier, joue sur un effet du « plus, plus, plus » et fait miroiter moult services contre monnaie sonnante et trébuchante dont sera exclu le simple pékin moyen. Toute cette poudre aux yeux me fait d’ailleurs penser à ce sketch des têtes à claques Chevallier & Laspales (début 0:21), pas vous ?
Les sites en question justifient donc cette obole par du contenu supplémentaire pour le lecteur. Pourtant, j’ose le dire je suis j’étais premium chez GK, et ceux pour plusieurs raisons. (Avant de revenir sur mes motifs d’abandon du premium GK, voici pourquoi je l’étais devenu) j’ai sauté le pas en mars 2015 en devenant premium sur l’ancienne formule, suite au clash entre GB et GK et l’attitude puérile et hystérique du premier envers le second, qui a clairement clarifié les enjeux et risques des journalistes JV de trop copiner avec les éditeurs. Pour moi GK avait affirmé sa position et s’était fixé (ou rappelé) une déontologie qui faisait l’honneur de ce site vétéran du web vidéoludique (que je consulte depuis 2003). Ainsi, j’avais pris le parti de sauter le pas et d’afficher un soutien symbolique en devenant premium ancienne formule (3 €/ mois), bien avant cette remise à jour. Le second point fut la nouvelle orientation du site qui finalement a laissé tombé progressivement cet aspect trollesque qui lui collait à la peau (le départ de Chocapic et le changement de ton des forums, sans parler de la nouvelle équipe plus sympatoche et moins hautaine) et l’arrivée de nouvelles émissions, transformèrent le ton du site qui me séduisit.
De nouveaux contenus
Outre une refonte très agréable du site (mode lecture de nuit merci pour les yeux), la rédaction joue sur le retour de certains anciens rédacteurs (Raggal !) et de nouvelles émissions ou de reportages de grandes qualités. À titre d’exemple, j’ai encore en tête celui sur la rue République, Mecque de l’import (sans mauvais jeu de mots) à Paris ou encore la sémillante émission Gaijin Dash consacrée au Japon.
Désormais, si le site a toujours un contenu gratuit, une grande partie sera réservée aux premiums, avec un contenu plus mature et plus creusé : « Là où ses principaux concurrents misent sur une proposition éditoriale à destination des joueurs occasionnels et adolescents, Gamekult fait donc le pari d’une information plus riche, approfondie et ouverte » comme l’affirme Yukish (Thomas Cusseau) sur cette page explicative de ce changement majeur pour le site. Autres points positifs, il est possible d’envoyer un code pour partager un article que l’on a aimé avec un pote durant 24 h. Tout cela pour 4,90 € par mois ou annuellement à 39,90 €, avec en prime un numéro offert de JV le mag ou The Games, la presse papier partenaire d’un site internet, enfin.
Alors, quels soucis ?
Mais pourtant, cette offre premium à laquelle j’adhérais n’est pas la panacée, loin de là. Ce qui me gêne avec ces offres, c’est le manque de transparence du procédé. En effet, si le lecteur obtient un certain nombre davantage élitiste, quid des lecteurs qui n’ont pas forcément à mettre quelques euros dans de l’info sur le Net ? L’offre payante ne remet-elle pas en compte la question de la gratuité du Net qui a finalement taillé à juste titre des croupières à la presse papier qui a si souvent négligé internet et refusé de se moderniser, notamment dans sa relation au lectorat. Si on peut se satisfaire que désormais bon nombre de sites ou de canards papiers ont été obligé de se réformer (je pense à mon JV le mag ou CPC) pour tenter de faire revenir un lectorat qui les avait abandonnés, on ne peut que glorifier internet d’avoir fait pression sur ce milieu lent à se moderniser tels les luddistes du XIXe siècle qui refusaient toute révolution technologique ou plus proche de nous, comme nos taxis du XXIe siècle.
Autre point soulevé : Il est dommage que le lecteur qui souhaite participer à son site préféré ne soit pas informé de l’impact de sa donation dans le fonctionnement du site, et là perso j’attendais que GK ou GB clarifient leur position : quel est précisément l’impact financier de cette mesure ? Après un échange, la réponse du rédacteur en chef de GK fut sibylline : cela ne concerne pas les lecteurs, circulez y a rien à voir ! Extraits d’échanges sur Twitter où je fus assez surpris de l’attitude de M. Thomas Cusseau :
Curieuse réaction, face à une question tout simple et apparemment inoffensive : à quoi sert le coût de l’abonnement du premium ? (en % : quelle part pour les documentaires, les intervenants, …. et sans rentrer dans les détails du sacré saint nombre de personnes concernées). Donc assez incompréhensible comme réaction, et surtout bien loin des belles déclarations d’intention sur le web pour lancer le Premium… quelle tristesse …
Alors, est-ce que le Premium n’est pas l’arbre qui derrière un joli enrobage de nouveaux contenus (de qualité, reconnaissons-le) dissimule un moyen pour monnayer une base de lecteurs auprès d’éditeurs ou d’agence de marketing ? Comme pour obtenir des budgets pubs plus conséquents pour la partie gratuite du site ou vendre les listings profilés des premiums pour exploiter les habitudes de consommation de ces « clients » prêts à investir dans GK et donc potentiellement économiquement viables ? Et là…. ça serait bien moins glorieux (« Voilà nos visiteurs réguliers, voici le nombre d’abonnés que nous avons… votre pub/ notre listing peut donc toucher un lectorat très large » CQFD$$$...).
A la rentrée 2018, nouvelle page pour Gamekult : désormais 90% du site devient… payant ! Ainsi, seul les Premiums peuvent accéder au contenu du site et le principe du DLC est appliqué pour les autres : si un article intéresse, il faut payer son accès. La collaboration n’a donc jamais été aussi loin avec l’émission « Arrêt sur image » où GK est invité régulièrement : on voit d’où vient l’influence. En outre, on peut s’étonner du principe : comment attirer de nouveaux lecteurs en mettant payant toutes les émissions dont les deux principales : « l’émission » du samedi et « Gaijin Dash » sur le Japon… . Curieuse stratégie. Ensuite, le discours a évolué : en devenant payant, la formule devient un moyen de contribuer aux financements des émissions, et non plus à fournir uniquement de nouveaux contenus comme présentés au départ du Premium : est-ce le signe d’un fin de cycle ? Celui d’un financement par la pub ? D’être financé par un groupe plus grand qui cherche de la rentabilité assurée via des abonnements ? Le manque de communication sur les recettes/ dépenses comme n’importe média, comme on peut le voir dans la presse papier, laisse courir les rumeurs préjudiciables.
Ce choix de sauter le pas ou non relève bien d’un choix personnel, chacun balayant devant sa porte sur cette question. Perso, bien que « premium » sur GK, je suis désormais dubitatif devant une telle opacité.
Est-ce que je me suis fourvoyé en soutenant ce site qui cherche à diversifier ses revenus pour affirmer son indépendance et fournir un vrai plus à ses lecteurs ? Et contrairement aux affirmations du rédacteur en chef de GK, si j’avais sauté le pas du premium c’était bien une marque de soutien, comme je le fais quand je me rends chez ma kiosquière pour mon JV le mag ou que je reçois pas la poste mon quotidien (Le Monde). Oui M. Cussereau, financer la presse est un acte militant qui conduit en retour à un besoin de transparence que vous n’êtes pas prêt à franchir ?
Finalement à l’heure du tout numérique, la presse comme d’autres domaines se doit de trouver un équilibre entre services de qualité, à un prix correct pour assurer son indépendance et fournir une information mature, tout en privilégiant les relations humaines.
Alors est-ce que le premium serait la solution à suivre sur le modèle antique de l’abonnement de la presse papier ? Les lecteurs de 2018 seraient-ils prêts à payer pour avoir une info de qualité ?