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L’été dernier, je plébiscitais les films du Studio Ghibli pour passer les vacances d’été avec ses gamins. Cette année, j’ai découvert le Studio Chizu, moins connu que celui de Miyazaki, mais fort de quatre superbes films d’animation que je vais vous présenter aujourd’hui.
L’animation japonaise… rien de tel pour occuper ses enfants intelligemment pendant les vacances, lâcher les paddles pendant une paire d’heures, et passer un bon moment en famille, tout en restant dans la geekosphère propre à notre blog. Enfin, il ne faut quand même pas leur faire regarder n’importe quoi non plus. Il existe quelques studios japonais produisant des longs métrages d’animation de qualité. Contrairement aux Disneys, ces films durent généralement deux heures, donc à éviter avec les plus jeunes, qui n’accrocheront pas nécessairement. Vous êtes prévenus !
Le studio Chizu a été fondé par le réalisateur Mamoru Hosoda, ancien de la Toei Animation et de Madhouse. Tout comme avec les oeuvres de Miyazaki, les quatre films de Hosoda que je vais vous présenter ont une patte graphique et scénaristique qui leur est propre. Les univers des deux réalisateurs sont très proches, proposant tous deux une réflexion humaniste et plusieurs niveaux de lecture, mais ils accusent quelques différences fondamentales.
Regardons de plus près. Chez Miyazaki, ce sont davantage les personnages féminins qui sont à l’honneur : les héroïnes ont peu ou prou le même look et les mêmes traits de caractère dans chaque film, Miyazaki étant un véritable féministe dans l’âme. Cette tendance féministe culminera dans Ponyo, sur la Falaise près de la Mer, où la déesse de la mer, qui représente le féminin au plus haut niveau (le niveau cosmique), rencontrera Lisa, l’image même de la femme indépendante et progressiste, ancrée sur la terre. Il me semble en ce sens que Ponyo restera son œuvre la plus singulière et la plus aboutie : c’est un peu le Wind Waker de Miyazaki, lui qui d’ordinaire est obnubilé par les machines volantes !
Hosoda, de son côté, propose également des personnages féminins progressistes, tout en déployant cette dichotomie permanente de la tradition et de la modernité, propre à l’esprit japonais. Mais Hosoda se concentre davantage sur les personnages masculins, qui sont clairement à l’honneur dans ses films. Chez Miyazaki, ceux-ci ont le rôle de héros subalternes, parfois un peu idiots, et surtout prétextes aux scènes d’action : on retrouvait cette dynamique autrefois avec le personnage de Valérian, dans les BD éponymes de Christin et Mézières, qui permettait de mettre en valeur le personnage de Laureline par contrepoint (le film, qui vient de sortir, passe presque complètement à côté de cette dynamique, en mettant les deux héros sur un pied d’égalité).
Hosoda est très différent dans son approche du masculin. Sans jamais abandonner la lutte des femmes et leurs aspirations à trouver leur place, Hosoda choisit de mettre davantage le paquet sur l’homme. La problématique de la place de l’homme vis à vis de la femme est toujours asymétrique : au lieu d’encourager l’homme au modernisme, Hosoda appelle au contraire celui-ci à se tourner vers ses racines, vers son côté primitif et animal. C’est que la modernité ne lui réussit pas, étant donné l’état actuel de notre monde ! Aussi, il me semble qu’Hosoda a décidément pris la relève de Miyazaki, et ça fait du bien.
A voir… petite sélection perso :
Film n°1 : La Traversée du Temps (2006).
Ce n’est pas le meilleur film du studio mais demeure une bonne entrée en matière. Un scénario sympa, qui raconte la suite d’une nouvelle très connue au Japon et qui a connu de nombreuses adaptations. Le résumé : Makoto, une lycéenne de 17 ans, se lie d’amitié avec Chiaki et Kôsuke, deux élèves très différents. Tout se passe bien, jusqu’au jour où elle découvre qu’elle peut remonter le temps à sa guise à la suite d’un accident de train qui aurait dû se produire.
Film n°2 : Summer Wars (2009).
Un film plus engagé, sur les ravages potentiels de l’intelligence artificielle et du tout connecté, avec une tension entre tradition et modernité qui marche à fond. Je n’ai pas pu le voir en entier faute de temps mais mes gamins l’ont regardé trois fois… c’est dire ! L’action se concentre sur Kenji, un jeune lycéen passionné par les mathématiques qui travaille l’été au service informatique d’Oz, un réseau social en ligne qui est une gigantesque communauté virtuelle mondiale. Jusqu’au jour où une I.A. pète les plombs…
Film n°3 : Les Enfants Loups, Ame et Yuki (2012).
Probablement le film le plus connu d’Hosoda, qui a eu un succès d’estime en France et qui est également étudié dans les collèges. C’est un excellent film que je vous recommande vivement, en famille. Un peu comme avec Captain Fantastic, c’est un film qui questionne sur la façon d’élever ses enfants. Le début du film semble un peu dingue, mais tout le reste suit sans problème.
Film n°4 : Le Garçon et la Bête (2015).
Énorme succès au Japon, ce film est du même niveau que le précédent, certes plus fantastique et porté sur l’action, mais il n’en reste pas moins superbe et profondément initiatique. Il questionne également sur la façon d’élever ses enfants, et notamment sur l’abandon, l’adoption, et indirectement sur la famille recomposée. Lorsque vous l’aurez vu, vous n’aurez plus qu’une devise : « Le sabre avec le coeur ! »