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Depuis mon déménagement, plus de télé : il faut donc se débrouiller avec des DVDs divers et variés pour occuper ces gosses de papagamer pendant un mois de Mai (et bientôt Juin) particulièrement pluvieux. Petite sélection personnelle qui n’a rien d’imposée (loin de moi l’envie de faire des clones geeks de ma progéniture).
L’avantage du no TV @ home : finis les shows débiles h24 du style Robocar Poli, Sam le Pompier ou Wubbzy l’écureuil cocaïnomane (exemple en vidéo ci-dessous) sans parler des Lapins Crétins et autres Garfield survoltés du service public. Avec ce dernier, on est bien loin de l’esprit de la bande dessinée de Jim Davis, originellement hyper statique, en seulement trois cases et à l’humour décalé, parfois imperceptible…
Ceci dit, avec les dessins animés du moment, on est encore plus éloigné des superbes dessins animés « pédagogiques » des années 80 et qui fonctionnent encore très bien avec les enfants d’aujourd’hui, n’en déplaisent aux nouveaux ministres de l’éducation nationale et aux inspecteurs d’académie.
Depuis 6 mois, donc, dans notre foyer, les dessins animés sont fournis à la demande, et exclusivement sur DVDs : longs métrages ou séries intégrales au programme, avec l’idée d’avoir une véritable histoire avec un début et une fin (ras le bol de ces séries qui accumulent les one-shot ineptes). Des DVDs, j’en accumule pas mal depuis mes années d’étudiant et je me suis toujours dit : « ça, ça pourra servir pour mes gosses ». Coup de pot, ils adorent. Comme quoi la valeur artistique d’une œuvre prime sur son aspect commercial. Ainsi, mes gosses ont un faible pour les longs métrages de Miyazaki. Et je ne les ai pas forcés.
Pourquoi celà me fait-il tout particulièrement plaisir ?
On a tendance à l’oublier, mais Hayao Miyazaki, c’est toute une époque : celle de l’essor progressif du jeu vidéo 8 et 16 bits, d’un âge d’or poussiéreux et révolu. Celà se ressent dans les codes narratifs, l’esthétique, et la musique même de ses œuvres. On sent bien qu’au Japon, déjà, dans les années 80 et 90, les genres commençaient à s’interpénétrer. Un Samurai Shodown IV a clairement le même bagage génétique qu’un Princesse Mononoké.
Vous allez me dire « c’est le papagamer qui parle » : en effet, je suis obligé d’être un peu raccord, toute culture geek mise à part, car je suis précisément dans ma période annuelle où je ne touche plus au paddle – déformation familiale oblige – donc il faut bien que je me justifie. Néanmoins, la plupart des films de Miyazaki sont sortis en France rétroactivement, d’où le fait qu’on ait tendance à les assimiler à des préoccupations plus tardives : navré de vous décevoir, mais Nausicaa ou la Vallée du Vent n’a rien à voir avec EELV ni avec la Playstation One et FF7. Bon, vue l’esthétique générale, vous vous en étiez doutés. Ou pas ?
Miyazaki raconte véritablement quelque chose, et se pose dans un système de valeurs et de filiation. Et c’est là sa ligne de conduite. Ses longs métrages ne sont pas un prétexte pour vendre des figurines. Ils offrent plusieurs niveaux de lecture – un niveau pour enfants et un niveau pour adultes – chose qu’on n’a pas vraiment vue en occident avant le travail de Pixar, avec les Shrek ou plus récemment Vice-Versa.
La teneur humaniste, spirituelle et le sens du sacré (mais sans pour autant tomber dans le new age ni dans le féminisme de caniveau) de Miyazaki a été saluée à de nombreuses reprises par la presse comme un vent de fraîcheur sur le monde du cinéma dans son ensemble, permettant au Studio Ghibli de percer en France et de créer un véritable phénomène culturel. Ainsi, Miyazaki nous invite au voyage et au mythe, tout en incitant à la tolérance et à la paix entre les peuples (bon ok, j’arrête le politiquement correct).
Même si c’est parfois de façon naïve, Miyazaki pose l’amour au sens noble et l’acte créatif au sens large en tant que magie véritable des êtres humains. A l’instar d’un Jodorowski, il nous propose une véritable religion athée et citoyenne qui renoue avec la tradition du conte comme moyen, but et fin en soi. Une thérapie qui ne s’encombre pas de croyances, en somme. Rien de tel que de transmettre ces valeurs à ses propres enfants à l’heure actuelle.
Pour couronner le tout, le langage de ces longs métrages est plutôt châtié. Bien qu’en tant qu’adultes papgamers nous préférons (forcément) la version japonaise sous-titrée, nous pouvons saluer le travail de traduction et de doublage de ces films. Ceci n’est pas vrai pour un Samurai Champloo de Shinichiro Watanabe, série culte et à la base superbe, mais que le doublage français proscrit complètement pour un usage familial.
TOP 10 actuellement de ce que mes enfants préfèrent (mais ça dépend un peu de l’humeur du moment) :
1) Ponyo sur la falaise près de la mer
2) Princesse Mononoké
3) Mon voisin Totoro
4) Kiki la Petite Sorcière
5) Le Château dans le Ciel
6) La série animée « Sherlock Holmes »
7) Le vent se lève
8) Le château de Cagliostro
9) Porco Rosso
10) Le Château Ambulant
Le Voyage de Chihiro n’arrive qu’à la 11e place en dépit de sa grande qualité, mais c’est parce que nous ne l’avons pas encore en DVD… Il faut en effet savoir ménager ses effets… !