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[#25] Heroes of Might and Magic II : patch de l’archange

Temps de lecture : 8 minutes

Heroes of Might and Magic II (ou Heroes II) est le second opus d’une série de jeux de conquête heroic fantasy au tour par tour sorti sur PC en 1996. Il n’est pas anodin qu’archangelcastle.com, site francophone dédié à la saga Heroes, ait récemment développé et diffusé un nouveau patch, appelé « Patch de l’archange », près de vingt ans après la sortie du jeu original. Et pour cause, Heroes II est un de ces jeux qui accrochent et font passer des nuits blanches, un petit bijou aux graphismes kitsch et au gameplay impeccable. En plus, il permet de jouer à plusieurs en hotseat, avec un seul PC, à une époque où le jeu informatique était encore inexorablement associé au jeu solo, comme décrit dans cet article : avec Heroes II, bonne ambiance garantie autour de l’ordi.

Alors pourquoi Heroes II continue d’être pratiqué malgré le temps qui passe, et malgré ses incompatibilités notoires avec le 64 bits ? Pourquoi est-il considéré par ses aficionados (dont je fais partie) comme le meilleur de la série ? Hé bien, pour plusieurs raisons, en fait.

Vidéo présentant le jeu, en français, du site « résistant » consacré à Heroes II : http://homm2.free.fr/

 Voyons donc les raisons qui font qu’Heroes II est souvent considéré comme le meilleur. Le premier opus, Heroes of Might and Magic (sorti en 1995) est déjà beaucoup moins attrayant que son successeur. Il jetait les bases, mais avec des graphismes et un gameplay beaucoup moins aboutis que dans Heroes of Might and Magic II. Ses problèmes de compatibilité notoire l’empêcheront définitivement de passer à la postérité.

Le successeur de Heroes II, Heroes of Might and Magic III (sorti en 1999), avait été attendu avec impatience, et gardait quasiment le même système de jeu, avec des graphismes plus fins et des musiques de qualité. Il frise cependant un degré de perfection qui peut être envahissant : arborescence des châteaux très vaste, créatures trop nombreuses, toutes améliorables et presque toutes spéciales, sorts magiques divisés en catégories, également améliorables, et chaque bouton sur lequel on clique fait du bruit (j’ai horreur de ça). Une fois qu’on a tout maîtrisé, on s’ennuie. Heroes II n’est pas parfait, et c’est ce qui fait son charme. Même lorsqu’on est connaisseur, on est susceptible de découvrir quelque chose de nouveau à chaque partie (hier soir encore, j’ai découvert une stratégie redoutable avec les grands vampires).

Un extrait du bestiaire d’Heroes II

Mais le souci principal d’Heroes III et des suivants vient du bestiaire, qui est plutôt mal senti par moments, et qui va même jusqu’à emprunter à l’imagerie chrétienne, laissant un arrière-goût de fourre-tout commercial. Par opposition, le bestiaire d’Heroes II cristallise astucieusement tout l’univers Heroic Fantasy des années 70 à 90, avec des figures bien tranchées, du hobbit au dragon noir en passant par le nain guerrier, et qui sont immédiatement reconnaissables entre mille. La modélisation de ces créatures pose encore problème dans Heroes III, avec une 3D passée en 2D façon Donkey Kong Country complètement has been, des sprites minuscules, et ces demi-tours pénibles qui rendent les combats poussifs, sinon ridicules. Heroes II utilise quant à lui de gros sprites 2D chatoyants, kitsch et colorés, et les champs de bataille sont de ce fait plus lisibles, l’action y plus rapide et efficace. Les maps d’Heroes II ont également ce petit quelque chose qui rappelle les jardins anglais du XVIIIe et XIXe siècles, avec une perspective faussée et des couleurs vives du plus bel effet. Les successeurs ont tout rapetissé, et le passage à la vraie 3D dans Heroes IV n’a pas arrangé les choses.

Une bataille dans Heroes V

Puisqu’on en parle, Heroes IV est mon détesté de la série, car ses concepteurs ont vraiment tout changé au système de jeu, ce qui était assumé de leur part. Mais ils sont vite revenus à un système plus traditionnel avec Heroes V, qui est une réussite : les créatures sont bien modélisées, et les champs de bataille en vraie 3D ont de la gueule, et apportent quelque chose au jeu. Mais sa complexité, notamment en ce qui concerne l’arborescence des châteaux, le système de sorts, les nombreuses options, et la mise en place des combats, est nuisible au jeu en hotseat, sans parler de la pauvreté des maps à plusieurs. Heroes II à l’avantage d’être fluide, vite et bien joué, et son éditeur de maps est populaire et simple d’accès. Il est facile de se procurer des maps sur internet. Du reste, Heroes II, ce sont aussi les premiers sites et communautés en ligne francophones des années 90, dont il reste encore quelques drôles de vestiges sur la toile.

Un château barbare dans Heroes II

Enfin, Heroes II revêt une dimension culturelle toute particulière. Ce jeu est sorti à peu près en même temps que Game of Thrones, roman d’heroic fantasy de R.R. Martin (récemment adapté en série à succès) et il est manifeste que le livre et le jeu sont liés. Dans le premier tome de Game of Thrones, on est immédiatement saisi par la similitude entre la description des villes Dothraki et les châteaux barbares. De même pour le nom de certains châteaux du jeu, qui copient ou pastichent ceux de Westeros. Certains scénarios de Price of Loyalty, l’extension de Heroes II sortie quelques mois plus tard, mettent même en scène ouvertement Khal Drogo et Daenerys à Vaes Dothrak. J’apprécie tout particulièrement ce crossover et ce décalage temporel : quand je lis Game of Thrones, je vois Heroes II et rien ne pourra me l’enlever. Un livre du XXe siècle a été adapté en série TV à grand succès au XXIe, et un jeu vidéo presque oublié du XXe siècle a été remis au goût du jour par un patch 20 ans après. Du grand art !

LE PATCH DE L’ARCHANGE

Mais revenons à ce fameux Patch de l’archange, qui se destine à Heroes II et plus précisément à son extension : Price of Loyalty. Voici une vidéo-test-interview qui fait état de tous les changements concernant ce patch. Attention c’est une vidéo destinée aux connaisseurs, elle est longue et ne propose pas beaucoup d’action. A écouter en fond sonore, de préférence.

Le Patch de l’archange a été développé en fonction des témoignages et avis de joueurs sur le forum d’Archangel Castle. J’avais visité la page il y a quelques mois, et il est clair que tout le monde avait sa petite lubie personnelle à ajouter au projet. Cela a cristallisé pas mal de frustrations et au final, on est assez dubitatif en ce qui concerne le produit fini, comme l’exprime indirectement l’auteur de cette vidéo-test face à l’auteur du patch, même si on ne peut qu’être admiratif devant le travail accompli. C’est déjà beau d’avoir fait un patch 20 ans après la sortie du jeu, c’est un symbole fort pour les joueurs résistants d’Heroes II. Mais pour chaque « plus », quelque part, on trouve un « moins » à cause du trop grand nombre de compromis qui ont été faits de par l’approche « participative » du patch.

Détail d’une map dans Heroes II

Le gros atout du patch : un no-CD qui fait bien plaisir, encore qu’il semble poser des problèmes de lancement parfois. Et je ne vois pas comment écouter les superbes musiques CD sans le CD (les puristes préfèrent les musiques MIDI, c’est vrai qu’elles sont pas mal et ont l’avantage de ne pas ralentir le jeu).

Les points clés d’équilibrage : plusieurs avantages donnés aux chevaliers, originalement assez faibles et pourtant sympas à jouer. Le coût en bois des bâtiments (très élevé chez les chevaliers) baisse, notamment le ponton, avec hélas ce choix étrange de mettre du fer dans la construction de ce dernier, quelle étrangeté… ! Le nécromancien est également boosté par une réduction du prix de ses bâtiments clés en ressources rares. Les autres modifications sont assez mineures mais intéressantes en soi, quelques injustices ont été corrigées notamment dans le potentiel d’évolution des héros.

Le gros avantages pour tous les joueurs : baisse du prix des guildes des magiciens à tous les étages, facilitant l’accès aux sorts. Comme pour les prix des autres bâtiments modifiés par Archangel Castle, on trouve parfois des valeurs exotiques. Pourquoi 1337 d’or pour le niveau 1 ? Encore une fois, quelle étrangeté !

Le château des chevaliers, boosté par le patch

Au final, on trouve quelques avantages sympas à ce patch, mais on a l’impression, par moments, qu’ils ont un peu trop bidouillé les stats. Le pire c’est la croissance des fortes créatures, qui est nulle sans le puits : si on construit le bâtiment des dragons, on ne peut donc pas en faire… sans les puits… Quelle drôle d’idée… De façon générale, on peut déplorer d’un côté des choix « mystiques » dans l’attribution de certaines valeurs, ou au contraire, trop rationnels et calculés dix coups à l’avance. Mais c’est ça Heroes II : un jeu à la fois carré et imparfait. Personnellement, j’en aurais changé le moins possible : le no-CD, l’accès aux guildes facilité, un ponton à 10 bois, et pas grand chose d’autre. Car chaque équipe a des forces et des faiblesses. Par exemple, chevalier et barbare sont moins bien pourvus et doivent forcément aller conquérir rapidement, ça fait partie de leur dynamique de jeu. De même, les sorcières ont de gros avantages sur l’eau, ce qui leur donne une forte mobilité, mais pêchent sur le long terme. Suivant la taille de la map, il ne faudra pas jouer avec un magicien ou un nécromancien, etc, etc. Mais bref, ça fait plaisir que des passionnés aient sorti ce patch pour rendre le jeu plus accessible et rendre hommage à ce que je considère encore comme mon jeu préféré.

Vous pouvez télécharger le patch de l’archange sur http://homm2.free.fr/

EDIT (mars 2017) :
Vous pouvez télécharger Heroes 2 the Succession Wars gratuitement dans une version anglaise et compatible avec les systèmes Windows actuels – ce qui n’est pas rien – en vous rendant sur cette page. Il s’agit d’un site abandonware espagnol, mais très simple d’utilisation, et qui propose aussi foule d’autres jeux (y compris Heroes 1).
Vous téléchargez (en espagnol : descargar) directement votre .exe et vous le lancez, sans avoir besoin de faire une install. Ça roule impeccablement grâce à une interface DosBox automatisée. Voilà deux ans que je cherchais ce lien pour vous le proposer… Enjoy !

8.8

The Good

  • Remet au goût du jour un jeu presque oublié
  • Le patch NO-CD
  • Les chevaliers rééquilibrés
  • L'accès aux guildes des magiciens facilité
  • Les stats d'évolution des héros remaniées

The Bad

  • Certaines stats un peu trop bidouillées par volonté de consensus
  • Des pierres pour construire les pontons
  • La croissance des créatures de niveau 6 nulle sans puits
8.8 Octofun ?
8.8 Adapté à la vie du papagamer ?
9 commentaires
  1. octopaddaone
    10 Fév. 2015 à 20:05 -----> lui répondre

    Merci pour ton article, car c’est une série (un peu comme les Ultima) que je connaissais de noms, mais je n’avais pas de pote qui le possédait sur ST ou amiga, n’ayant pas ce type de bécane pour y jouer personnellement ! Bref, un peu comme les jeux neogeo que l’on connaissaient mais qu’on avait pas (même si point de vue budget on était kifkif / matos !). Actuellement, je pense que je passe mon tour, ce gameplay pouvant me rebuter en 2015 malheureusement … ha l’âge …

  2. lamyfritz
    10 Fév. 2015 à 21:04 -----> lui répondre

    En tant que papagamers, on manque de trop de temps pour aller perdre notre vie sociale sur des jeux comme ça aujourd’hui.

  3. lamyfritz
    24 Juil. 2015 à 09:27 -----> lui répondre

    Sauf en vacances, où je rejoue activement, et en famille… !
    News : le site résistant d’Heroes II fait peau neuve cet été.
    J’ai vu des vidéos d’Heroes 7 : on dirait le 5, en un peu mieux fait. Toujours aussi beau et « copieux » mais toujours aussi lent, poussif et fouillis, donc parfaitement inadapté au hotseat.

  4. melkiok
    10 Déc. 2015 à 23:39 -----> lui répondre

    « Il frise cependant un degré de perfection qui peut être envahissant »

    « Les maps d’Heroes II ont également ce petit quelque chose qui rappelle les jardins anglais du XVIIIe et XIXe siècles,
    avec une perspective faussée et des couleurs vives du plus bel effet »

    Tu abordes avec un à propos linguistique tout à fait pertinent les travers de Heroes III et le design délicieusement suranné qui continue de m’enchanter avec Heroes II

    J’ai passé des soirée / nuits blanches entières avec mon frères à se faire du coop (avec chacun son héros) devant le PC
    Entre le graphisme exquis et les musiques enchanteresses et même en étant beaucoup moins efficient que mon frère (9 ans d’écart quand on a 10 piges seulement ça pèse lourd dans la balance) ce fut une des meilleurs expériences « multi » ever

    D’ailleurs je m’en file voir ce patch de l’archange car ton article m’a donné furieusement envie de m’y remettre

    Un avis sur la réédition qui a eu lieu il y a peu sur les plateformes digital ? 😉

  5. lamyfritz
    11 Déc. 2015 à 12:49 -----> lui répondre

    Oui, mou aussi Heroes 2 me plaît par son style kitsch, mais avec une jouabilité impeccable et un potentiel stratégique sans cesse renouvelé. Pour les plateformes digitales, est-ce que tu fais référence au site Gog ? Pour essayer le patch, il faut la version Gold (expansion : Price of Loyalty). Sur les sites d’abandonware il est certainement possible de trouver un ISO.

  6. lamyfritz
    1 Mai. 2016 à 19:25 -----> lui répondre

    weekend sous la pluie : j’ai ressorti Heroes 2 cet aprèm. Incroyable, j’arrive encore à être surpris par ce jeu. Aujourd’hui, entre autres, j’ai réussi à rallier des dragons rouges et des génies. Je ne savais pas qu’on pouvait le faire. Je n’ai encore jamais réussi à rallier ds dragons noirs ni des titans, cependant.

  7. lamyfritz
    2 Oct. 2016 à 11:56 -----> lui répondre

    Nouveauté : un podcast de la Caz Retro sur Heroes of Might and Magic 1 et 2, à écouter pour les passionnés :
    http://lacazretro.fr/episode-93-heroesofmightandmagic/

  8. Claudius
    7 Juin. 2019 à 15:07 -----> lui répondre

    Mes préférés s est heroes 2 après le 5
    Dans le heroes 2 mon montre préfère s est le phénix je comprends pas pourquoi donner 150 ou 200 point au phénix pour moi les phénix sont les créatures les plus fort du jeu si on bien les utiliser il font très mal 100 c était bien
    Les sorcière le top château combiné à chevalier barbare tu casse tout même dragon et titan pas peur
    Des nuits entière j ai passé j y joue encore
    Je sais pas m en lassé

    1. lamyfritz
      8 Juin. 2019 à 11:55 -----> lui répondre

      Salut Claudius, merci pour ton retour sur ce jeu auquel je joue encore régulièrement en 2019.

      oui, les phénix sont balèzes car il jouent les premiers grâce à leur grande vitesse (et ils volent, ce qui ne gâche rien), mais à skill de héros équivalents ils ne font pas tant de dégâts que ça et encaissent plutôt mal les attaques. Lorsqu’on rencontre des phénix en créatures errantes sur la carte, ils sont effectivement les plus dangereux de tous, et il faut au moins un autre phénix ou des cavaliers dans son armée en position haute pour jouer avant eux et les contrer (un sort de mass slow les calme bien généralement). Ceci dit, plus ça va, plus je recherche, pour les fins de partie, le dragon noir (sans autres troupes) combiné au sort Armageddon. Tout à fait d’accord, le château des sorcières est un des meilleurs pour démarrer, surtout s’il y a de la mer dans la map – un des pires est alors celui des chevaliers, qui demande beaucoup trop de bois et freine le développement maritime, souvent crucial. En fin de partie, les héros sorcières ont l’inconvénient de gagner beaucoup trop de points de connaissance passé le niveau 10 – ça reste très pratique pour le sort dimension door ceci dit – mais du coup ils sont moins balèzes au combat. Prendre un héros barbare est alors une bonne solution, mais attention à la magie…! A force égale, c’est elle qui fait généralement la différence.

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