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Alors que j’étais en train « d’endurer » Max Payne 3, que les corps s’empilaient sous les mouvements souples et esthétiques de mon « gun », une réflexion commença à germer. Pourquoi donc tous ces mecs tombent sous mes balles ? Pourquoi donc arrivent-ils tous à l’endroit exact où je me trouve ? Et pourquoi arrivent-ils tous les uns après les autres, et non en même temps pour me faire la peau ? Ayant acquis Max Payne 3 pour son soi-disant scénario polar brut de décoffrage, je ne suis peut-être pas rentré complètement dedans. L’expérience a alors tourné au questionnement et à l’indignation. Si bien que cela m’a sauté aux yeux. Mais quoi donc ?
Et si finalement ces hommes placés sur mon parcours, n’étaient pas là pour me pousser au « high-score ». Si vous êtes un joueur trentenaire ayant connu l’ère 8 et 16 bits, vous vous souvenez qu’à l’époque le but était bien entendu d’arriver à la fin du jeu, mais aussi de faire le plus gros score possible. A cette époque, les Shoot’em up et les Beat’em all étaient légions. Ces types de jeux populaires poussaient les gamers les plus acharnés à faire le plus gros score possible. Qui n’a pas essayé de mettre son nom sur la borne d’arcade du bar de son quartier ? Mais cette notion de score a évolué au fil des années.
Explications : avec l’apparition des jeux d’aventures, jeux bacs à sable de plus en plus vaste, la ligne de score a progressivement disparu du haut de notre écran. Mais disparu n’est peut-être pas le bon mot. En fait le principe du scoring est devenu autre chose. Peut être moins moral d’ailleurs. Gardons l’exemple de Max Payne 3. Bien que scénarisé et se voulant immersif, le but du jeu n’est pas finalement de faire le plus de morts possibles : j’ai l’impression d’avoir tué la moitié de la planète ! La notion de score dans ce jeu est plus subtile, voire viscérale. On vous note sur la manière : plus on tue avec classe et meilleur est votre style… et plus haute sera votre note. Pas très moral, si on y regarde bien. De plus, ces notes vous permettent de débloquer des upgrades et autres récompenses.Vous avez bien tué, alors on vous récompense, mouais … .
Avant, le but était de mettre le plus de bourre-pifs ou de détruire le plus de vaisseaux possible. Peut-être est-ce dû à la naïveté de notre âge à l’époque qui faisait qu’on se marrait à mettre de mandales à tout ce qui bougeait. Je ne me souviens pas d’avoir eu l’impression de « tuer » dans la jeu. La défaite de l’ennemi dans des jeux comme Street of Rage ou Parodius, était représentée à l’écran par sa disparition. En ce sens on était devant un jeu, les personnages ne mourraient pas vraiment, et on avait ouvert le passage. N’idéalisons pas non plus, car peut-être que si la technique l’avait permis, la mort aurait été mise en scène comme aujourd’hui (cf. Mortal Kombat)

la violence US à la TV, traumatisme d’une génération
A l’inverse de nos jours, les ennemis meurent atrocement en éclaboussant l’écran de leur sang. Avec les progrès techniques, on peut même voir l’expressivité de la souffrance, de la mort sur leur visage. On se rapproche donc du réel, c’est presque identique aux images de guerre que l’on peut voir au 20h. Pourquoi alors toute cette violence ? Le débat sur la violence de notre média préféré est une Arlésienne depuis son origine. J’y vois peut-être un lien avec le recul du jeu japonais et la montée des jeux occidentaux. Nous avons tous – plus ou moins – grandi avec la culture américaine, que cela soit entre les films et les séries TV, qui nous abreuvaient d’images violentes à grand coup de flingues. Pourtant fans de film comme l’Arme fatale et consorts, j’avoue aujourd’hui que ces films des eighties, bien que super fun était relativement violent. C’est un fait de la culture américaine, les armes et la violence et sans la rejeter aujourd’hui, je l’aime toujours autant d’ailleurs.

Du bon, du lourd ricain, voilà les années 80 !
On le sait depuis la génération PS3 et XBOX 360, le jeu japonais est en net recul. Les jeux d’aujourd’hui sont en majorité issus de studios américains. En créant un jeu, il vont forcément mettre de leur culture pop, si bien que nous cherchons tous un peu de poésie japonaise aujourd’hui. Car, bien que souvent guerrier ( DMC, Lost Planet, Final Fantasy, etc ..), le jeu japonais dégage une poésie et un souffle épique unique.
Mais revenons au cheminement de notre réflexion. Avec le recul des jeux japonais plus légers dans le traitement de la mort, les studios américains ont modifié peu à peu la notion de score que les joueurs japonais aimaient tant. Au profit du Skill à tuer. On peut résumer beaucoup de jeu d’aujourd’hui à » Tuer avec du style », et ce Skill est le « High-Score moderne ». Les jeux à score ne sont pas pour autant mort, voire même je dirais qu’ils reviennent sur le devant de la scène depuis peu. Du phénomène Candie Crush à Angry Birds, mais aussi Trials, Olli Olli, le jeu vidéo arrive à nouveau à nous proposer un challenge autre que « tuer » avec du style. Mais gardons à l’esprit que les jeux les plus vendus actuellement (Call Of Duty, Battlefied) sont des jeux où le champion sera celui qui aura tué le plus de monde. Encore une fois, on se trouve dans une problématique pas très morale et le jeu en ligne accentue ce malaise. Car à l’époque votre score devait être battu par les gars qui fréquentaient le bar du coin. On souvenait vous, on même pouvait envoyer ses scores à son magazine préféré pour le voir être publié et voir aussi son classement par rapport aux autres. Grâce à internet, on peut désormais se mesurer au monde entier, et voir si on est le plus gros « Killer » du moment.

Emile L., un gamer bien classé au niveau mondial
Bref je me sens mal à l’aise avec ce scoring mortifère, c’est peut-être çà d’être un gamer trentenaire. Sur ce, je retourne sur Tearaway, une perle de poésie sans scoring guerrier, allez hop on se fait un origami ?