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Bienvenue dans les années du cul, du lourd et du gras
La révolution des séries et de tous médias culturels (manga, comics, musique, …) qui grâce à internet trouvent une diffusion massive, à notre convenance (légale ou non d’ailleurs), a profondément renouvelé notre façon de consommer ces biens culturels. Cependant ce plaisir de disposer quand on veut de ces biens à se mettre sous les yeux ou dans les oreilles, m’amène droit dans une faille spatio-temporelle pour se remémorer un temps que les moins de 30 ans ne peuvent connaître : la France télévisuelle sèche et cruelle des années 80-90.
Ceux qui n’ont pas connu les années 80/90 ne peuvent comprendre : pas d’internet, bloquées à 6 chaînes (de TV) françaises, dominées par les ancêtres de Julie Lescaut (qui prendra sa retraite fin janvier 2014, punaise la fin d’un cycle), comme Marie Pervenche, Navarro et autres dominèrent les heures télévisuelles. Heureusement, que nous jeunes générations des 90 furent sauvés du déclin par la japanim d’un club Do’ (Dragon ball et autres collège fou fou), des émissions sur le sevice public (Récré A2) et de nombreuses séries US (Agence tous risques, K2000, Supercopter, Mac gyver, …). Mais là encore, la réalité empêchait de croire, penser, espérer un jour béni où les diffusions seront instantanées, chez soi selon nos envies : que nenni, ces émissions/ séries butaient sur la triste limite de la diffusion unique hebdomadaire (et seuls les bourgeois avec un magnétoscope pouvaient se rematter en boucle jusqu’à la semaine d’après les séries de la veille : hé oui pas de possibilité de voir autres choses, pas de streaming ou Replay… donc fallait bouffer son frein).

Julie Lescaut ou Sangoku … y a pas photo, hein ?
Arrêtons nous un instant sur cette jap’anim qui a fait tant couler d’encre à l’époque, faut imaginer : le Club Dorothée, première émission jeunesse de France diffusait sur la première chaîne (en terme d’audience et de place) de la japanim de 8h55 à 18h le mercredi, certes entrecoupée du journal et de sitcoms insipides (qui a dit Premiers baisers et autres navets estampillés AB production ?) et le pauvre jeune téléspectateur ne prenait pas le risque de zapper sur d’autres chaînes sous faute de tomber sur d’innommables japaniaiseries. Chez la concurrence, la 5 pouvait se vanter d’avoir un bon Olive et Tom (Captain Tsubasa), véritable fan service pour les footeux, mais la chaîne de Berlusconi zieutait déjà les plus jeunes (filles) avec ses catastrophiques Jeanne et Serge, Lucy reine du rock’n roll et autres princesse Sarah, qui donnaient vraiment envie d’acheter un 357 ou du cyanure pour Princesse Sarah au vu de l’arrière fond social hyper flippant, comme le décrit le joueur du grenier :
Bon il est vrai que les doublages furent catastrophiques, parfois censurés. Les Chevaliers du zodiaque, Gi Joe (et son placement de produits) Dragon Ball et autres Ken le survivant peuvent également faire sourire aujourd’hui pour leurs violences bon enfant (encore que Ken le survivant et son fatality ULTRA sanglant, punaise quand j’y pense … remarque ce fut bien la preuve qu’un contenu gore diffusé en plein après-midi ne donna pas lieu à la création de millions de psychopathes). Mais il faut se souvenir de la vendetta politique menée par Ségolène Royal, députée des Deux-Sèvres, ou de Catherine Tasca du CSA. Voici ce que déclarait notre Sainte Ségo en 1989 dans son ouvrage « Le ras-le-bol des bébés zappeurs », et cela vaut son pesant de cacahouètes :
« […] Il y avait dans la télévision d’ « avant » des règles simples. Il y avait les gentils et les méchants. Et, en général, le gentil, le héros, tuait moins que les autres. Il gagnait aussi parce qu’il était le plus malin. Et puis il s’occupait de la veuve et de l’orphelin, ou de l’animal blessé. Dans les dessins animés et les séries japonaises (du moins ceux que l’on voit sur les chaînes commerciales françaises), ou dans certaines séries américaines, tout le monde se tape dessus. Les bons, les méchants et même ceux qui ne sont rien, les figurants de la mort. Le raffinement et la diversité dans les façons de tuer (explosions, lasers, commande à distance, électrocutions, animaux télécommandés, gadgets divers…) se sont accompagnés d’un appauvrissement des caractères, d’une uniformisation des héros, dont la seule personnalité se réduit à la quantité de cadavres alignés, ou à la couleur de la panoplie du parfait petit combattant de l’espace. »
Triste constat, quand l’ignorance flirte avec le mépris, cela donne de bons résultats, n’est-ce pas Ségolène. Comme le rappel très bien le bon article d’Actu BD, en 1980 les mangas japonais étaient l’équivalent de la fidélité pour un président de la République : mission impossible et destination inconnue. Même Osamu Tezuka (le dieu des Mangas pour tout Japonais moyens) présent à Angoulême en 1982 fut tristement ignoré par tous les grands pontes en visites (politiques et cie). Cela a bien évolué de nos jours, Ségolène ne doit plus dormir, car la France est devenue le 2e marché au monde (derrière le Japon) pour la consommation de manga… la France baigne-t-elle pour autant dans le sang où « tout le monde se tape dessus » ? Autre époque, autres moeurs.
Enfin, on peut remercier les programmateurs des années 80/90 pour avoir diffusés cette avalanche de mangas et séries, qui si leurs faibles coûts furent la première des préoccupations des chaînes de TV, n’en furent pas moins la preuve éclatante du soft power japonais (par son influence culturelle désormais bien ancrée en France) mais aussi l’ouverture d’une porte sur un autre monde pour nombres d’enfants/ ado, dont les jeux vidéos n’en furent que l’avatar.